S’enraciner dans l’automne
Avec l’automne et les couleurs qui apparaissent aux sommets des arbres, commence pour l’herboriste le temps d’explorer le monde souterrain. Parle-t-on ici de l’underworld si important pour les voyages shamanique et la psychologie des profondeurs? Non, pas nécessairement. Je voulais simplement parler des racines, de leurs utilités, de leurs récoltes et de trois d’entre-elles.
Pourquoi récolter les racines en automne?
Les arbres qui se parent de leurs magnifiques couleurs automnales sont un indice d’un phénomène qui atteint tout l’écosystème. En effet, c’est une réponse à la diminution de la photopériode. La chlorophylle n’est plus aussi efficace et les arbres la dégradent et la recyclent, retournant ainsi l’énergie dans les racines.
C’est aussi le cas des plantes vivaces de plus petites tailles qui renvoient sous terre ce qu’elles récupèrent dans leurs feuilles. Les racines deviennent donc plus riches en divers éléments médicinaux importants, comme l’inuline.
Les hauts et les bas de l’inuline
Si les racines sont plus nutritives en automnes et qu’elles sont en dormance pendant l’hiver, ne peut-on pas attendre au printemps pour les cueillir? Et bien justement, non, surtout pour celles qui contiennent de l’inuline, comme les trois que je vous présenterai bientôt…
L’inuline est une forme de stockage de carbohydrates pour les plantes. Contrairement à l’amidon, elle n’est pas digestible par les enzymes de l’intestin, ce qui en fait un prébiotique important. Or, l’inuline est détruite par l’hiver et les gels, se transformant en fructose, bien moins utile d’un point de vue thérapeutique! (1).
L’inuline en effet améliore le microbiote en nourrissant les bifidobactéries et les lactobacilles, ce qui pourrait même soutenir l’immunité (2). En plus, elle améliore le contrôle de la glycémie et diminue la résistance à l’insuline chez les personnes atteintes de diabètes de type 2 (3).
En bref, on cueille les racines à l’automne parce qu’elles sont plus médicinales en cette saison!
Comment cueillir les racines?
J’utilise généralement une fourche à bêcher pour diminuer les risques de sectionner une racine (ou un vers de terre). Je commence par libérer le sol autour de la racine visée. Quand j’ai presque dégagé toute la racine, je tire et, avec un peu de chance, elle vient entière. Après, il est important de la nettoyer à grande eau assez rapidement, puis de la sécher avec un chiffon. Je la coupe généralement avant de la mettre au séchoir parce que dans la plupart des cas, fractionner une racine sèche est vraiment plus difficile.
Une autre astuce : je préviens généralement la plante que je vais cueillir sa racine quelque temps avant. Me comprend-elle? Je ne le sais pas, mais il me semble qu’elle vient plus facilement sans se rompre quand j’applique cette politesse.
Un dernier détail, certaines plantes, comme l’aunée et la guimauve, présentent leurs racines sous forme d’amas central d’où partent des racines latérales. Je coupe alors les racines latérales avant de replanter le cœur en terre, ce qui permet de préserver chaque individu et de diminuer le temps entre les récoltes.
Mes racines préférées!
Pour ne pas trop traîner en longueur, je me contenterai de vous présenter trois de mes favorites!
L’incroyable grande Aunée
Ceux qui me suivent m’ont sans doute déjà entendu parler de cette plante qui est l’une de mes préférées. Elle est bien connue pour son action pectorale (elle aide à l’expectoration – l’expulsion du mucus des poumons—et la résolution des infections pulmonaires).
Une recherche sur PUBMED dévoile en plus tout un potentiel d’actions thérapeutiques hautement intéressantes : du contrôles des staphylocoques résistants aux antibiotiques à la résolution de l’inflammation et même à la protection de l’ADN et la prévention des cancers (4).
Dans ma pratique, je mets à contribution son côté anti-inflammatoire et antimicrobien pour mes clients atteints de la maladie de Lyme. Quant à moi, personnellement, je lui trouve un côté « joyeusisant » qui m’aide à entrer dans l’action.
Je pourrais continuer sur la grande Aunée pendant plusieurs pages, mais arrêtons ici pour passer à la plantes suivante…
La bardane, plante de l’enracinement
Si vous avez déjà tenté de récolter cette plante tenace, vous savez que la bardane est profondément enracinée. C’est le don qu’elle a à nous offrir. Bien sûr, c’est aussi une altérative efficace qui aide à éliminer les toxines des cellules. Gare cependant aux crises de guérisons si vous ne la jumelez pas avec des plantes qui favorisent l’élimination!
Les Japonais l’utilisent en cuisine sous le nom de gobô. Cette racine goût effectivement très bon et possède des propriétés neutraceutiques très importante, entre autre pour la flore intestinale.
Pourtant, peu importe ces utilisation scientifiques et traditionnelles, la bardane reste pour moi la plante de l’enracinement. Je la suggère à ceux qui sont trop dans leur tête, pas assez dans leur corps. Souvent, je l’associe avec la plante suivante…
Le pissenlit, un soutient doux à l’élimination.
Est-il une herbe plus commune que le pissenlit? On dit parfois que les plantes dont nous avons le plus besoin sont celles qui poussent dans notre cours. Et bien dans le cas du pissenlit, c’est sûrement le cas! Tout le monde peut bénéficier de son action…
Elle aide le foie, les intestins et les reins à faire leur travail. Elle prévient ainsi toute sortes de problèmes de santé : lourdeur digestive, maux de tête, déséquilibres hormonaux, troubles de la peau et j’en passe!
Manger du pissenlit est une très bonne illustration de la phrase : « que ton aliment soit ton remède » d’Hippocrate, père de la médecine – et de l’herboristerie!
À vos fourches!
Alors, vous ai-je convaincu de sortir vos fourches ou vos pelles et de vous planter les mains dans la terre pour en obtenir les plus beaux des trésors? Si vous avez des questions sur les racines qui vous conviendraient le mieux, ou si vous souhaitez obtenir de l’aide pour mieux vous enraciner dans la vie, n’hésitez pas à prendre rendez-vous avec moi!
Anaïs de Valicourt
450-365-5232